Cette mini série nostalgie s’explique pour nous, en ce printemps 2020, par un manque de la montagne dû au confinement. Depuis ma naissance, tous les ans, nous faisons un séjour dans les Alpes.
Cette année, il était prévu des vacances dans le Mercantour afin de découvrir ce massif que je ne connais pas bien. Si nos projets n’avaient pas été fâcheusement contrariés par ce maudit virus, je serais en train de vous envoyer une carte postale.
La première fois que j’ai découvert les Alpes, c’était en Haute-Savoie et j’avais moins de trois semaines. Ma maîtresse m’a d’emblée présenté un de ses endroits favoris : le massif du Mont Blanc. Elle ajoute, qu’à chaque arrivée, c’est le même regard enchanté, chargé d’émotion.
Je venais de faire le trajet Normandie-Chamonix sur ses genoux et d’une sagesse exemplaire (j’avais encore mes yeux bleus, tellement j’étais bébé).
L’année suivante, j’ai découvert la Mer de Glace. Après avoir pris le train du Montenvers à Chamonix, nous sommes arrivés près de ce glacier, qui bien des années avant ma naissance était beaucoup plus conséquent.
Elle m’a montré « les Drus » et m’a parlé de Walter Bonatti (né à Bergame en 1930 et mort à Rome en 2011). Depuis, je me suis penché sur la vie de cet alpiniste, guide de haute montagne, journaliste et photographe au palmarès impressionnant.
Elle ajoute qu’elle est passionnée par tous les exploits réalisés en haute montagne mais surtout par les premières accomplies par des pionniers. Pour plus de détails lisez le billet : « Au Pays du Mont Blanc » du 10 décembre 2016
Face aux Drus, pics vertigineux qui se dressent dans le ciel de Chamonix, elle m’explique comment ces granits (le Dru -ou petit Dru- 3 733 m et le Grand Dru 3754 m) étaient le rêve de tous les grimpeurs.
Les Drus vus de la Chapelle des Praz
Cette paroi magistrale, qualifiée alors de pilier imprenable, a été vaincue en solitaire (pendant 6 jours et 5 nuits) par la face dominant le Montenvers, en août 1955 par Walter Bonatti. Cette première du pilier sud-ouest du Dru (qui porte son nom) est sans doute l’une des plus mémorables ascensions du palmarès de Bonatti, considéré alors comme le meilleur alpiniste de son époque.
les Drus vus du Montenvers
Bonatti, le roi des Alpes, avait « sa conception de l’alpinisme » et il terminera son impressionnante carrière d’alpiniste de l’extrême et de ses ascensions prodigieuses, en février 1965, par son épopée de l’ascension du CERVIN, SEUL, en HIVER et par une VOIE NOUVELLE. Après il passera à autre chose et ses livres témoignent d’une vie bien remplie.
Les Drus que ma maîtresse me montre aujourd’hui ne sont plus ceux de 1955. En juin 2005, un séisme de roches estimé à plus de 250 000 m3 se détachent de la paroi et laissent une cicatrice de 700m de haut sur 100 m de large (l’endroit le plus clair sur les photos). Cette « blessure » dans la montagne a produit un fracas gigantesque entendu jusque dans la vallée.
Cinquante ans après son exploit, Bonatti voit « le mythe de son pilier » écroulé, lui qui pensait que cette paroi de la solitude lui survivrait à tout jamais.
« Les Drus d’hiver » peints par Lionel Wibault.
pour ce peintre et guide de haute montagne, voir le billet «Chamonix , Lionel Wibault » du 13 septembre 2019.
En rentrant à Chamonix, notre regard, toujours fasciné, admire ce massif où flèches, aiguilles et crêtes nous mènent à la rondeur sommitale qui s’unit à la glace et fait du Mont Blanc un joyau étincelant.
Toutes ces journées à la montagne sont passionnantes, et de retour à l’hôtel où j’ai mes habitudes, j’aime contempler l’Arve qui « rugit » sous le balcon.
A la semaine prochaine.