Tapez « Hashtag beau matou » et instantanément vous me voyez prêt à vous écrire ma vie !
Comme vous l’avez compris, je réside en Normandie, à deux pas de la mer et en un saut de puce (si je puis dire) je suis sur les planches à Deauville !
Ah les planches ! Quand j’étais petit ma maîtresse me portait dans un sac en bandoulière sur son épaule, et, tout près d’elle, le nez au vent, je respirais l’air marin et j’admirais la grande plage de sable fin.
Maintenant que je suis « un grand » je voyage dans mon véhicule de transport personnel et là, prélassé dans ma « cabine » je scrute les badauds et nous arpentons ces célèbres planches créées en 1923 en bois d’azobé et mesurant pratiquement 635m. Elles permettaient alors aux belles dames de profiter du bord de mer sans salir leurs élégantes toilettes. Elles sont célèbres, aussi célèbres que le promenade des Anglais à Nice (où je me suis également promené).
Sur ces planches, ma halte préférée est au Bar du soleil à l’heure du soleil couchant. C’est un moment à part, où l’horizon se teinte de couleurs dignes de la palette des peintres, Ma maîtresse et ses amies aiment y flâner, et j’adore les accompagner ! Pendant qu’elles dégustent leurs cocktails, je vous présente ses deux amies, comparses de nos voyages comme de nos courtes escapades : l’une est brune et possède un chien, (en fait la chienne noire dont je vous ai déjà parlé) et l’autre amie est blonde et partage sa vie avec un chat très digne et élégant, c’est un Sacré de Birmanie. Tantôt l’une, tantôt l’autre, ce sont alternativement mes compagnons de voyage.
Rentrons à la maison.
L’automne se passe, puis vient l’hiver, bien au calme et au chaud près de la cheminée (les flammes me fascinent), et enfin, arrive mon moment préféré : le printemps.
Dès le mois d’avril, du seuil de la porte je retrouve avec plaisir toute la vue sur notre jardin. Je sais tout ce qui se passe dehors grâce à mes comparses d’aujourd’hui.
Petites précisions sur mes nouveaux compagnons félins. Pendant l’hiver 2014, par la fenêtre, j’ai vu errer deux chats, l’un roux et l’autre spotted-tabby, qui visiblement recherchaient nourriture et chaleur.
Connaissant ma maîtresse, je savais que je n’allais pas tarder à faire leur connaissance de plus près.
Effectivement ; mais il a fallu faire un bon travail d’approche car, tous les deux, étaient quasi sauvages.
Avec de la patience et des croquettes appétissantes, l’un, puis l’autre se sont laissé caresser.
Après il y a eu l’apprentissage d’un toit bienfaiteur sans angoisses.
Voici, maintenant que je les connais bien, quelques détails sur leur vie d’avant.
Le « Roux » a été baptisé Zadig par ma maîtresse. Quand il est arrivé, boitant, le visage griffé et en lambeaux, il a fallu commencer par « réparer le chat ». Nous avons soupçonné que son chemin n’avait pas été facile. Et son côté malchanceux lui a valu son prénom.
Nous appelons la spotted-tabby, fine et élancée, Sissi. C’est notre petit clin d’œil au souvenir de notre Impératrice autrichienne si gracieuse et si éprise de liberté.
Sissi est une jolie minette qui n’est pas commode. Sa vie de sauvageonne lui a appris à être constamment sur ses gardes et elle en garde quelques réflexes.
Maintenant, Zadig et Sissi sont devenus deux chats câlins qui aiment squatter mes endroits douillets et je dois reconnaître que ça ne me plait pas toujours. Je ne suis pas d’un naturel jaloux, j’essaie de partager en bonne harmonie. J’en profite pour qu’ils me racontent leur dure survie de chats abandonnés. J’en apprends des choses.
Par exemple, Zadig avait été offert à une famille, qui, dès son plus jeune âge l’a mis dehors si souvent, qu’un jour du mois de mai, attiré par l’aventure, il n’est pas retourné devant la porte si souvent close. Il a quitté son domicile pour suivre des minettes. Là, sa vie s’est vite compliquée, il lui a fallu être très débrouillard. Le hasard de ses pérégrinations l’a conduit dans mon quartier où un vieux matou très grincheux et pas commode fait régner une loi sans merci. Il s’en est suivi les belles balafres ! J’ai assisté, dans mon jardin, à une bagarre entre les deux greffiers, où complètement enroulés, toutes griffes et dents dehors, ils sont allés jusqu’à l’épuisement du plus jeune ! D’où la récupération par ma maîtresse d’un individu poilu à qui il manquait beaucoup de poils !
En résumé, Zadig a bon caractère, il est sympathique, crédule et jamais découragé.
Pour Sissi, je la connaissais de longue date dans le jardin. Elle est née dans nos dépendances mais dès toute petite elle était très sauvage. Il en a fallu du temps pour qu’elle se décide à nous faire confiance. Elle m’a avoué depuis ne pas le regretter, d’ailleurs maintenant, elle fréquente assidûment les canapés et les édredons obèses dans ma maison.
Ces deux là sont donc maintenant bien installés « at home » !
Ma maîtresse m’a fait adopter une phrase de Saint Exupéry. « Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé », ainsi je veille sur eux et nous trois, félins, nous veillons sur ma maîtresse avec beaucoup d’amour et de ronrons.
Moi, je l’enveloppe d’une tendresse discrète, je dois dire que sa sollicitude m’est essentielle, et, mes concitoyens, eux, la chouchoutent de leur mieux avec reconnaissance.
Leurs présences, je dois l’avouer, a un peu changé notre rythme, avant leur arrivée, on vivait elle et moi, nimbés de silence, on avait l’habitude de respirer tranquillement côte à côte. Mon caractère s’accommodait bien de ce duo reposant. J’aime le calme, la tranquillité, mais depuis l’arrivée de ces deux énergumènes mes objets aux vertus apaisantes ont été un peu bousculés et quelquefois ça me froisse. D’ailleurs je peux reprendre à mon compte une phrase de Guy de Maupassant « les chats, c’est comme le papier, ça se froisse vite ». Vous l’aurez compris je veux bien partager mais il faut me laisser une paix royale pour que mon humeur reste chattissime.
Quand le rush de l’été a quitté nos côtes normandes, nous partons vers la Côte Fleurie. En plus de Deauville, j’ai deux endroits privilégiés : Honfleur et Cabourg.
Par exemple à Honfleur j’adore l’église Sainte Catherine. C’est la plus grande église de France construite en bois avec un clocher séparé. Quand on lève les yeux sa charpente nous évoque la coque d’un bateau renversé.
En quittant cette église dédiée à Sainte Catherine d’Alexandrie on se dirige vers le vieux bassin. Les maisons qui le bordent sont du XVIIe et XVIIIe siècles, elles sont hautes et étroites et leur reflet dans l’eau en fait un lieu prisé des peintres. Parmi les plus célèbres qui ont aimé et fréquenté Honfleur il y eut Courbet, Boudin, Monet… C’est un endroit plein de charme que l’on aime photographier et je dois dire que le doux clapotis de l’eau sur les coques des bateaux me berce agréablement.
A Cabourg , ma petite Madeleine, à moi, c’est de somnoler tranquillement, promené par ma maîtresse, longeant la promenade Proust. Pendant qu’elle part à la recherche du temps perdu je suis agréablement bercé par le doux bruit de la mer.
À l’automne nous aimons aller au Mont Saint Michel. Parmi nos visites là-bas, ma favorite a été celle qui a duré plusieurs jours et qui nous a permis de dormir sur le Rocher. Dès la tombée de la nuit, on profite des derniers rayons de soleil et de la lumière qui décline sur toute la baie. Les ruelles vidées de leurs visiteurs et des pèlerins, nous avons l’impression que le Mont nous appartient, et c’est dans ce calme quasi religieux qu’on apprécie réellement l’atmosphère de la « Merveille ». Après une longue flânerie nous pouvons aller nous coucher et rêver, bercés par le clapotement des vagues et veillés par l’Archange Saint Michel.
En s’enfonçant dans les terres de jolis villages normands et classés nous attendent.
Par exemple Beuvron-en-Auge, c’est un village très fleuri et typique de la Normandie avec ses maisons à colombages, son vieux manoir du XVI, ses jolies boutiques pleines de produits du terroir.
Faisons aussi une halte à Saint Cénéri-le-Gerei. C’est un village classé, niché dans un méandre de la Sarthe au cœur des Alpes mancelles. J’ai pu y admirer son église romane du XVè avec de superbes fresques, son bien beau pont de pierre et j’ajoute que mon petit moment de bonheur c’est folâtrer dans la prairie avant de découvrir la sobre et harmonieuse Chapelle dédiée à Saint Cénéri. Ce village de caractère me charme et me permet de passer à Alençon, ville où j’ai des attaches particulières et là nous visitons la Basilique et la maison natale de Sainte Thérèse sans parler du beau musée de la dentelle.
Je ne vais pas arriver à vous énumérer toutes nos balades dans la campagne normande. Toujours, ici et là nous faisons de nouvelles découvertes mais c’est avec plaisir que nous rejoignons notre chacunière.
Chez nous, donc, quand arrive le printemps je suis impatient. Au début du mois d’avril je prends mon poste d’observation sur le seuil de la porte et je guette celles qui ravissent mon cœur et mes yeux. Je veux parler des hirondelles ! Quand elles arrivent avec leurs froufrous d’ailes et leurs gazouillis si particuliers je suis heureux.
Dès leur arrivée commence l’incessant ballet vers leur nid où elles reviennent chaque année avec tant de régularité.
Quand je suis à la fenêtre du troisième étage, je suis tout près d’elles perchées sur la gouttière. Là, dans leurs chants mélodieux elles me racontent leur retour vers nous. Elles viennent de faire une traversée de plus de 6000 kilomètres. Je suis tout attendri. Vingt petites grammes de plumes capables de franchir le Sahara et la Méditerranée. Quelle leçon de courage !
L’hirondelle rustique qui niche dans notre cellier porte bien son nom. Je les admire, si vives, si gaies.
Je vais vous conter une histoire qu’elles m’ont rapportée et qu’elles se transmettent de génération en génération.
L’événement s’est passé en 1913 et en Savoie. Exactement au Monastère du Grand Saint Bernard. Une nuée d’hirondelles venant du Nord, surprise par un froid inattendu et une neige qui tombait à gros flocons, se dirigeaient vers l’hospice, transies et miséreuses. Les bons moines comprirent le désespoir de la situation et ouvrirent grand les portes et les fenêtres. Elles se sont engouffrées au chaud et réconfortées par une nuit à l’abri, le temps remis au beau, elles ont pu, ragaillardies, au matin, reprendre leur envol vers le midi.
Quelle merveille quand l’homme et la nature se comprennent si bien.
Petites boules de plumes, tous les ans, je guette vos allées et venues, et foi de matou je suis fier d’être votre ami. Sachez que toutes les dépendances de notre jardin vous attendent portes grandes ouvertes..
Pendant qu’elles couvent avec beaucoup de précaution leurs futures nichées, moi, je pars avec ma maîtresse en vadrouille aux quatre coins de la France ou plus loin encore.
Au retour de nos voyages je découvre « les petites » qui apprennent avec appréhension et hésitation leurs premiers vols. le ballet parents-bébés reprend de plus belle et leurs gazouillis m’enchantent tout l’été.
Ce rythme en Normandie s’achève, je vous dis à bientôt dans d’autres contrées.